La fascination d’Albert-Birot pour le cinéma est donc évidente, même si, à la différence de plusieurs de ses contemporains, une influence directe ne se manifeste guère que dans deux de ses poèmes, recueillis dans La Luneen 1924.
Vient donc tout naturellement le moment pour Albert-Birot de passer à l’acte. En octobre 1919, il publie, dans SIC (49/50), une assez longue étude “Du cinéma”, suivie d’un scénario, “2 + 1 = 2”. Dans la hâte, car, à la fois émerveillé par le nouvel art qui a tout juste vingt ans, mais inquiet de lui voir perdre chaque jour un peu de sa force poétique au profit de narrations romanesques visuelles, il veut prendre date. Il écrit rapidement Cinéma, le fait éditer dans la foulée, si vite qu’il prend à peine le temps de corriger les épreuves : Cinéma, imprimé sur un papier très ordinaire, à partir d’une maquette sommaire comporte une colonie de coquilles peu habituelles chez notre auteur !
Il ne fait guère de doute qu’un temps, le cinéma parut à Albert-Birot le vrai moyen moderne d’échapper à ” l’odieux réalisme ” qu’il exécra toujours. Il crut à ce qu’il nomma joliment “des ombres sur du calicot”. Il aima la rapidité, le raccourci, le rythme du cinéma. Il se délecta de tous les trucages qu’il utilise lui-même abondamment dans ses scénarios : éparpillement des personnages, simultanéité des actions, télescopages, jongleries avec déformations et escamotages ; sans oublier l’infini plaisir de remonter le temps en faisant défiler la bobine à l’envers.
Sous le titre Cinémas, ce volume reprend d’abord le texte du petit livre de 1920, Cinéma, drames-poèmes dans l’espace composés en 1919, auxquels s’ajoutent les inédits retrouvés, poème dans l’espace et synopsis. À la suite de “Pierre Albert-Birot raconte” et des “Chroniques” de “Pour vous”, quelques documents inédits complètent le recueil, regroupent l’ensemble de tous les écrits d’Albert-Birot sur un art qui le fit beaucoup rêver.