Genesis n° 5
Revue : Genesis
208 pages
Format : 22 x 27 cm
ISBN : 9782858932115
Date de parution : 1994
Prix : 22 €
Genesis s’efforce d’ouvrir dans chaque numéro de nouveaux champs d’investigation, mais aussi de creuser ses sillons et de ménager, d’un numéro à l’autre, échos et recoupements. Ainsi, une étude de la visite du château de Fontainebleau dans ” L’Éducation Sentimentale ” nous permet aujourd’hui de revenir à la fois sur les descriptions de Flaubert et sur les rapports entre écriture et document. Nous continuons la réflexion sur la généalogie de la critique génétique, amorcée dans les numéros 1 et 3 avec un recueil de textes de Paul Valéry sur les processus de genèse et l’esthétique des brouillons et deux rappels historiques consacrés au Vicomte de Lovenjoul, collectionneur passionné de manuscrits au siècle dernier, et à la critique Française des avant-textes dans les années cinquante. Mais c’est une voie inhabituelle et délibérément prospective nous que inaugurons dans notre section ” Enjeux “, consacrée à l’hypertexte. Il n’est pas question de céder à un effet de mode ou au désir d’égayer la poussière de nos archives de quelques paillettes high-tech, mais bien de prendre en compte un enjeu capital pour la génétique, puisque l’hypertexte n’est pas seulement un mode de publication – le seul qui permette de représenter de manière satisfaisante les dossiers génétiques complexes – et un outil de recherche et d’écriture qui changera sensiblement le travail du généticien, il promet également de renouveler le cadre conceptuel de ce travail. Jusqu’à présent, malgré tous les efforts qui ont pu être déployés pour penser la genèse de manière autonome, les manuscrits ont toujours été jugés à l’aune du livre imprimé, modèle culturel dominant. L’hypertexte nous offre un autre modèle intellectuel, une autre conception de la textualité qui traduit beaucoup mieux notre expérience des manuscrits de création. Enfin les bouleversements qu’il entraîne dans la manière d’écrire et de penser illustrent avec éclat une des idées force de la génétique : la création n’est pas séparable du support de son inscription. Ces bouleversements ne manqueront d’ailleurs pas d’avoir des répercussions sur l’objet même des généticiens : il faudra bien envisager un jour une génétique des hypertextes.
En attendant cette littérature de demain, c’est la littérature du XXe siècle qui occupe la première place dans ce numéro avec Roussel, Valéry, Kafka, Hofmannsthal, Nathalie Sarraute. Dans la section ” Enquête “, Nathalie Sarrate nous révèle que cette littérature moderne peut prendre ses racines dans la pratique des humanités classiques et dans les exercices de l’école de Jules Ferry. Mais on sait aussi toute l’importance, pour elle comme pour d’autres, de l’écriture de Kafka, et notamment, du ” Procès “, qui rompt délibérément avec une esthétique de la forme achevée et lui substitue un processus scriptural éternellement différé, consubstantiellement inachevable, comme le montre l’étude qui lui est ici consacrée. C’est à un autre précurseur, Raymond Roussel, que ce numéro rend un hommage particulier, puisque nous avons la chance de présenter, avec des pages de ” La Seine “, un inédit au sens fort du terme : ni l’œuvre, ni a fortiori ses manuscrits n’ont jamais été publiés, leur existence même étant totalement inconnue jusqu’à la toute récente arrivée des papiers de Roussel à la Bibliothèque nationale. Ajoutons qu’il s’agit d’une œuvre tout à fait unique, qui ne s’intègre à aucun genre existant, et que les manuscrits laissent deviner un très curieux mode d’écriture. Le dossier Roussel est complété par une ” Chronique ” qui vise à montrer ce que peut apporter la codicologie à une étude du manuscrit d’impressions d’Afrique. Il s’agit d’un de ces manuscrits complexes qui condensent plusieurs séquences chronologiques sur un même support matériel et que seul l’hypertexte permettrait de donner à voir de manière satisfaisante. Mais cet exemple démontre précisément que ni une transcription, fût-elle hypertextuelle, ni un fac-similé ou une image vidéo haute définition ne remplaceront jamais totalement le recours à l’objet manuscrit dont la matérialité constitue une source d’information indéfiniment exploitable.
Enjeux
9 Hypertextes – Mémoires – Écriture, par J. L. Lebrave
25 Machines à écrire et matière à penser, par B. Stiegler
51 Édition – Rhizome. A propos d’une édition historico-critique fondée sur le concept d’hypertexte et d’hypermédia, par D. Hoffmann
Études
63 Pour un Kafka en procès, par G. Neumann
89 Valéry précurseur de la génétique, par J. Robinson-Valéry
99 Visite guidée. Genèse du château de Fontainebleau dans l'”Éducation sentimentale”, par É. le Calvez
Enquête
117 Sur la langue, l’écriture, le travail. Extraits d’entretiens avec Nathalie Sarraute, par D. Sallenave
Inédits
123 “La Seine” : le manuscrit fleuve d’une pièce abandonnée, par P. Besnier, A. Angremy
Chroniques
153 Les cahiers d'”Impressions d’Afrique” : l’apport de la codicologie à l’étude génétique, par C. Bustarret, A. M. Basset
167 Un pionnier des études génétiques. Le vicomte de Lovenjoul et “Les Paysans” de Balzac, par R. Pierrot
175 Les études de genèse en France de 1950 à 1960, par C. Gothot-Mersch
189 Nouvelles d’archives, par O. de Guidis